Alors, il y a quelques années, j'étais à une brocante. Un vrai bazar organisé, vous voyez le genre. Et là, entre un service à thé ébréché et un portrait de chien visiblement traumatisé, je tombe sur un cahier d'écolier. Un vieux de chez vieux. La couverture ? Un festival de gribouillages. Des bonshommes allumettes en mode ninja, des cœurs transpercés de flèches, et, tenez-vous bien, des "Dessins Anglais Page De Garde" reproduits à l'encre bleue.
C’est là que la madeleine de Proust a fait son effet. Boum ! Retour direct en sixième. Et ça m'a fait réfléchir: pourquoi ces *Dessins Anglais Page De Garde* étaient-ils si populaires ? Pourquoi on les retrouvait systématiquement sur les cahiers, comme une sorte de virus graphique ?
Parce que, soyons honnêtes, qui n'a jamais, durant des heures de cours ennuyeuses (avouez!), griffonné ces fameux dessins ? Des drapeaux anglais stylisés, des couronnes bancales, des "God Save The Queen" maladroits. C'était un peu notre exutoire artistique, non ?
Mais au-delà de l'occupationnel, il y avait un truc. Une espèce de fascination bizarre. On était en France, on apprenait l'anglais (plus ou moins bien, hein, "The pen is on the table" résonne encore dans ma tête...), et on s'appropriait, à notre manière, une partie de la culture britannique. Une appropriation hyper-simplifiée, certes, mais une appropriation quand même !
Alors, *pourquoi l'Angleterre ?* Bonne question ! Est-ce que c'était la proximité géographique ? Le côté "so British" qui fascinait les jeunes esprits ? Ou simplement le fait que l'anglais, à l'époque, était LA langue étrangère à apprendre ? (Aujourd’hui, on a l'espagnol, le chinois… le choix est plus vaste, quoi).
Je pense qu'il y a un peu de tout ça. Mais il y a aussi un côté subversif. Dessiner un drapeau anglais, c'était une mini-rébellion contre l'autorité, contre le cours barbant. C'était une façon de dire : "Je suis là, mais je pense à autre chose". Et puis, c'était cool. Avouez-le !
Et puis, il faut dire, ces dessins étaient faciles à reproduire. Pas besoin d'être un génie du crayon pour dessiner un Union Jack approximatif. Une règle, un stylo, et hop, on pouvait passer pour un artiste underground... enfin, dans sa tête, quoi. (Est-ce que ça vous rappelle quelque chose ?).
Ce qui est fou, c'est que cette "tradition" des *Dessins Anglais Page De Garde* semble avoir traversé les générations. J'en vois encore, de temps en temps, sur les vieux cahiers, sur des tables d'école (oui, je suis du genre à observer les tables d'école, ne me jugez pas!). C'est comme une sorte de patrimoine graphique, un peu kitsch, un peu ringard, mais tellement attachant.
Alors, la prochaine fois que vous croisez un "Dessin Anglais Page De Garde", ayez une petite pensée pour tous ces élèves qui, avant vous, ont lutté contre l'ennui en griffonnant des symboles britanniques. C'est une petite part de notre histoire scolaire, un témoignage de notre créativité... et de notre capacité à nous évader, même pendant un cours de grammaire ! N'est-ce pas *wonderful* ?
